La méditation, ça ne marche pas !

Quoi, le gars il propose des cours de méditation et il prétend que cela ne marche pas? Il a pété un boulon ou quoi?

Je vous rassure, pas du tout. Vous aurez compris que ce titre a pour but de vous interpeller, cependant, il recèle un fond de vérité.

Je rencontre souvent des gens qui se mettent à la méditation, qui conviennent que ça leur fait du bien sur le moment, mais qu'ils continuent à avoir le cerveau qui tourne à mille à l'heure et qu'ils n'arrivent pas à endiguer le tourbillon incessant de leurs pensées.

Pour moi, il y a essentiellement trois raisons à ce constat.

Le manque de régularité est évidement une des raisons primordiales. On ne le dira jamais assez, le plus important dans tout travail de méditation, c'est la régularité. Faire une séance par semaine, cela peut vous détendre, mais ne vous fera pas évoluer en profondeur. Rappelez-vous l'image du chaudron d'eau que l'on met à bouillir. On ne se muscle pas le corps en faisant 3 pompes tous les 36 du mois, de même, on ne se muscle pas le cerveau en quelques séances espacées de méditation.

La deuxième raison, c'est une "mauvaise" méthode. Je ne vais pas m'étendre et casser du sucre sur le dos d'autres pratiques que la mienne, cependant, je note assez souvent une tendance à proposer des exercices de visualisation. Le paradoxe d'essayer de diminuer l'importance du mental en construisant du mental me semble assez évident.

Les exercices de visualisation peuvent avoir un intérêt, mais pas dans le cadre d'un apprentissage visant à calmer l'esprit. On en reparlera, car ce point mérite plus d'attention.

Enfin, le plus gros problème à mon sens, c'est le mépris du travail corporel. On ne peut pas faire évoluer l'esprit sans faire évoluer le corps en parallèle, ou plus précisément, cela prend beaucoup plus temps.

Le moyen le plus rapide d'agir sur l'esprit et de le changer en profondeur n'est pas de méditer mais de travailler le corps en pratiquant des exercices de neigong (le travail interne).

En effet, on va sérieusement travailler l'esprit pendant ces exercices. On va apprendre la lenteur, redécouvrir son corps et ses limites, développer son rapport au sol et son alignement corporel, sa détente musculaire et sa coordination. L'acquisition de qualités physiques (enracinement, détente et coordination), vont aller de pair avec l'acquisition de qualités de l'esprit (respectivement lâcher prise, non-résistance et silence mental).

L'un ne va pas sans l'autre. Je sais que pour un occidental c'est un concept étrange. Pourtant la médecine chinoise a de très bon résultats sur des pathologies mentales comme l'anxiété en agissant sur le corps et son énergie. Le travail du corps, va être notre médecine : en renforçant le corps, en le détendant, en renforçant son énergie et en la faisant circuler, on va aussi agir sur notre esprit. C'est le cadeau bonux!

Ce qui nous arrange bien d'ailleurs, car le mental déteste que l'on essaie de lui faire perdre de l'importance. Si on l'attaque frontalement, cela va être vraiment compliqué, mais en passant par le corps, cela va se faire plus en douceur, presque à son insu.

Là ou ça devient carrément génial, c'est qu'à l'inverse, en travaillant en parallèle l'esprit (en méditant, donc), on va acquérir plus rapidement certaines qualités physiques, en particulier celles qui demandent un relâchement des tensions, mais aussi celles qui supposent une écoute de soi-même ou de l'autre.

Comprenez bien ceci : lorsque vous travaillez votre enracinement, via des exercices comme "tirer-pousser", vous ne travaillez pas seulement l'enracinement: vous travaillez aussi le lâcher-prise et l'écoute de l'autre. Lorsque vous peinez à reproduire des mouvements complexes où il faut faire attention à une myriade de détails, vous ne travaillez pas que votre coordination, vous travaillez aussi le silence mental.

Dans toutes les traditions orientales sérieuses, le travail corporel va de pair avec le travail de l'esprit. Je pense aussi bien aux soufis qu'aux yogis hindous. L'un ne va pas sans l'autre, et il n'y a que dans les pratiques syncrétiques modernes que cette séparation est faite. Je pense que c'est un grand tort. C'est comme de faire des pâtes sans sel : un seul ingrédient manque, et le plat est raté. C'est en ce sens que la méditation ne marche pas : elle marche beaucoup moins bien et beaucoup moins rapidement si elle est pratiquée seule que dans le cadre d'une pratique globale.

Cette interaction entre le travail des trois trésors (corps, esprit, souffle ou énergie) est la clé du succès.